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Cour et jardin

Fondamentaux du théâtre

Au théâtre, comme dans tout corps de métier, il existe un vocabulaire spécifique. Un·e metteur·se en scène parlera souvent à ses comédien·ne·s de "cour" et "jardin", mais bon sang qu'est-ce que ça veut dire ?

Qu'est-ce que c'est ?

C'est avant tout un repère spatial. Un moyen d'indiquer clairement à une personne présente sur la scène où elle doit aller : côté cour ou côté jardin. De manière plus historique, cela existe au théâtre depuis 1770 où le terme était utilisé à la Comédie-Française. La salle dans laquelle la troupe se trouvait étant située entre la cour du Louvre et le jardin des Tuileries, cette dernière avait bien un côté cour et un côté jardin.

Tu vas me dire : mais pourquoi on a gardé ça, alors qu'avant on se débrouillait très bien sans ? Et bien pas vraiment : avant, on parlait de côté de la reine ou côté du roi, les loges de chacun·e étant situé d'un côté et de l'autre de la scène.

Comme c'était une manière de s'exprimer un poil royaliste, au moment de la révolution française on a décidé d'abandonner le roi et la reine au profit de la dénomination venue tout droit du palais des Tuileries.

A quoi ça sert ?

À première vue, ça fait un peu gadget-je-me-la-pète, ces histoires de révolution française, de cour et de jardin. Mais pourquoi on les utilise encore aujourd'hui quotidiennement au théâtre, que l'on travaille avec une troupe amateur ou professionnelle ?

Tout simplement parce que cela permet à toutes les personnes qui montent sur une scène (ou qui dirigent ce qui s'y passe) de parler un vocabulaire commun et ayant toujours le même sens. Bien sûr, on peut parler de droite et de gauche, mais ça pose un soucis majeur : un·e metteur·se en scène demande à sa troupe de se décaler sur la droite. De quelle droite on parle ? Celle des artistes sur scène, ou celle du public ?

Les plus malins d'entre vous auront bien une astuce vicieuse : faire comme la troupe résidant aux tuileries et prendre un vocabulaire adapté à son propre lieu (côté tableau et côté papier-peint, par exemple). Mais encore une fois, ça pose quelques soucis :

  1. L'ouverture aux autres
    Tu invites une troupe à partager un atelier avec toi, c'est aux invités de comprendre de quoi tu parles et de s'adapter à ton vocabulaire, alors que tu pourrais utiliser un lexique que tout le monde connait.
  2. Le changement de lieu
    Quand à la fin de l'année, tu joues dans un théâtre qui n'a pas un tableau d'un côté et du papier-peint de l'autre, tu fais quoi ? Tu continues quand même d'utiliser ces deux noms pour désigner les côtés ? Du coup, tu réinventes un terme existant, mais qui ne sera connu que par ta troupe ?

Pour t'aider, notons qu'il existe quelques moyens mnémotechniques pour se rappeler de quel côté se trouve le jardin ou la cour

  • Du point de vue du public
    Tu penses Jésus-Christ ou Jules César, selon celui que tu préfères. Cela fait J-C. Jardin / Cour. Du point de vue du public : jardin à gauche, cour à droite.
  • Du point de vue de la scène
    Il faut se rappeler l'adage : "côté cour, côte coeur". Bon, encore faut-il savoir où se trouve son coeur, mais c'est encore une autre histoire. Du point de vue des artistes donc : cour à gauche, jardin à droite (l'inverse du point de vue du public, ce qui semble assez logique, au final).

Et pour l'impro ?

L'impro, c'est avant tout du théâtre. Cela se passe sur une scène, avec des comédien·ne·s et des metteur·se·s en scène (ou coach, tu les appelles comme tu veux). Prendre le vocabulaire du théâtre, cela permet plusieurs choses :

  1. Rappeler que le théâtre d'improvisation, c'est du théâtre
    Il ne s'agit pas de se la raconter et de dire qu'on fait du théââââââtre, il s'agit juste de rappeler que l'improvisation théâtrale n'est jamais que du théâtre sans texte écrit.
  2. Former des comédien·ne·s, pas juste des gens qui improvisent
    De fait, il ne faut pas les sous-évaluer ou les brider dans leur apprentissage. Un·e improvisateur·rice doit savoir qu'avant toute chose, ce qu'il ou elle fait, c'est du théâtre ! Une personne qui improvise du jazz est bien musicien·ne avant d'être jazz·wo·man.
  3. Répondre à des problème qu'on subi tous
    Ne pas vouloir parler de côté cour et côté jardin, sous prétexte que c'est pompeux, c'est un peu comme ne pas vouloir prendre de GPS pour faire 1000 bornes en voiture.